Google Europe) déclare au nom de l'entreprise, dans une interview accordée au Figaro : « J’avoue que nous avons été un peu surpris, voire choqués, de la réaction française à notre projet, car en aucun cas notre initiative a des velléités politiques qui viseraient à asseoir un quelconque impérialisme culturel américain. Google Print vise l’exhaustivité. C’est un programme populaire, qui s’adresse à tous sans distinction et qui respecte les valeurs de neutralité de Google »138. Dans Libération, l'entreprise explique avoir « entamé des discussions avec les bibliothèques de différents pays d’Europe pour leur proposer de numériser leur contenu », et explique : « nous n’avons jamais prétendu être les seuls acteurs d’un tel projet. C’est pourquoi nous souhaitons nouer des partenariats, notamment avec la BNF »139.
En août 2005, à Reims, Jacques Chirac (alors président de la République), accompagné de son chef du gouvernement Dominique de Villepin, et des ministres Nicolas Sarkozy, Thierry Breton et Gilles de Robien, rappelle sa volonté de définir « les grandes orientations de la nouvelle politique industrielle et d'innovation de la France », parmi lesquelles figure l'Agence de l'innovation industrielle140. Cette dernière, dotée d'un budget d'un milliard d'euros, est entre autres chargée de soutenir des projets privés franco-allemands, et en particulier « le développement d'un moteur de recherche multimédia sur internet », dont l'objet est « l'aide à la création et la production audio, vidéo, texte et image, l'archivage et la préservation du patrimoine multimédia, la création de bibliothèques numériques, des services de recherches multimédias, des services de transcription et de traduction et la protection et la surveillance de contenus ». La date de réalisation de ces projets, réalisés par France Telecom, Thomson et Deutsche Telekom, n'est alors pas évoquée. Cette annonce, bien que prévue de longue date, fait suite à la pause temporaire dans le projet de numérisation de Google. Le ministère de la Culture et de la Communication précise à l'époque que cette dernière « ne modifie en rien le projet de création d’une Bibliothèque numérique européenne, voulu par le président de la République. Plus que jamais, il est nécessaire que la France et l’Europe travaillent ensemble pour préserver la diversité culturelle et bâtir par des projets concrets une Europe de la culture. »
Cependant quelques voix discordantes se font entendre du côtés des petits éditeurs, qui souhaitent davantage un partenariat constructif avec Google. On peut citer entre autres les éditions de l'Éclat, qui détaillent leur point de vue :
« Le projet Google-Livres est le premier projet de grande envergure (...) qui permet une entrée en force du Livre dans l’internet. (...) On permet l’accès à une partie des contenus, on permet une recherche thématique à l’intérieur du livre, on renvoie à d’autres livres, à l’éditeur, vers des librairies, etc., mais jamais on ne se substitue au livre, dont la forme reste omni-présente à travers l’image même des
Sunday, March 2, 2014
n marge des pages et les liens privilégiés guideront vers des achats qui accentueront le déséquilibre. [...] Une autre politique s'impose. Et elle ne peut se déployer qu'à l'échell
couleurs spécifiques par rapport à la diversité des civilisations.
[...] N'oublions pas, d'autre part, un autre aspect de la question, qui concerne le travail en marche : dans l'océan d'Internet, où tout circule, dans l'ordre du vrai comme du faux, les processus de validation des produits de la recherche par les autorités scientifiques et par les revues prennent désormais une importance essentielle. La production scientifique anglo-saxonne, déjà dominante dans une quantité de domaines, s'en trouvera forcément survalorisée, avec un avantage écrasant à l'anglais par rapport aux autres langues de culture, notamment européennes.
[...] Ajoutons que, sous l'apparence de la gratuité, l'internaute rétribuera en fait Google, en tant que consommateur, puisque l'entreprise vit à 99 % de publicité et que la démarche qu'elle annonce ne vise qu'à obtenir un retour sur investissement grâce à celle-ci. Les publicités en marge des pages et les liens privilégiés guideront vers des achats qui accentueront le déséquilibre.
[...] Une autre politique s'impose. Et elle ne peut se déployer qu'à l'échelle de l'Europe. Une Europe décidée à n'être pas seulement un marché, mais un centre de culture rayonnante et d'influence politique sans pareille autour de la planète. L'heure est donc à un appel solennel. Il revient aux responsables de l'Union, dans ses trois instances majeures, de réagir sans délai - car, très vite, la place étant prise, les habitudes installées, il sera trop tard pour bouger. [...] C'est en avançant sur fonds publics que l'on garantira aux citoyens et aux chercheurs [...] une protection contre les effets pervers d'une recherche de profit dissimulée derrière l'apparence d'un désintéressement. »
Contre l'indifférence des pouvoirs publics (sur ce dossier comme sur d'autre - notamment le rachat de Sygma par Corbis, filiale de Microsoft), il appelle à une prise de position de la part des décideurs politiques des pays concernés ainsi que des instances européennes. Sa prise de position sera amplifiée par la publication d'un ouvrage de 120 pages intitulé Quand Google défie l'Europe / Plaidoyer pour un sursaut (Éditions Mille et une nuits). Une dépêche AFP souligne que cet appel connaît un certain retentissement, même à l’échelon international. De fait, quelques jours plus tard les chefs d’État de six pays membres de l'Union européenne (France, Pologne, Allemagne, Italie, Espagne et Hongrie) ont demandé dans une lettre à la Commission européenne et au Conseil de l’Europe la mise en place rapide d’un débat sur une future « bibliothèque numérique européenne », soulignant que « Le patrimoine des bibliothèques européennes est d'une richesse et d'une diversité sans égales. [...] S'il n'est pas numérisé et rendu accessible en ligne, ce patrimoine pourrait, demain, ne pas occuper toute sa place dans la future géographie des savoirs »137.
Nikesh Arora (alors Vice-Président
[...] N'oublions pas, d'autre part, un autre aspect de la question, qui concerne le travail en marche : dans l'océan d'Internet, où tout circule, dans l'ordre du vrai comme du faux, les processus de validation des produits de la recherche par les autorités scientifiques et par les revues prennent désormais une importance essentielle. La production scientifique anglo-saxonne, déjà dominante dans une quantité de domaines, s'en trouvera forcément survalorisée, avec un avantage écrasant à l'anglais par rapport aux autres langues de culture, notamment européennes.
[...] Ajoutons que, sous l'apparence de la gratuité, l'internaute rétribuera en fait Google, en tant que consommateur, puisque l'entreprise vit à 99 % de publicité et que la démarche qu'elle annonce ne vise qu'à obtenir un retour sur investissement grâce à celle-ci. Les publicités en marge des pages et les liens privilégiés guideront vers des achats qui accentueront le déséquilibre.
[...] Une autre politique s'impose. Et elle ne peut se déployer qu'à l'échelle de l'Europe. Une Europe décidée à n'être pas seulement un marché, mais un centre de culture rayonnante et d'influence politique sans pareille autour de la planète. L'heure est donc à un appel solennel. Il revient aux responsables de l'Union, dans ses trois instances majeures, de réagir sans délai - car, très vite, la place étant prise, les habitudes installées, il sera trop tard pour bouger. [...] C'est en avançant sur fonds publics que l'on garantira aux citoyens et aux chercheurs [...] une protection contre les effets pervers d'une recherche de profit dissimulée derrière l'apparence d'un désintéressement. »
Contre l'indifférence des pouvoirs publics (sur ce dossier comme sur d'autre - notamment le rachat de Sygma par Corbis, filiale de Microsoft), il appelle à une prise de position de la part des décideurs politiques des pays concernés ainsi que des instances européennes. Sa prise de position sera amplifiée par la publication d'un ouvrage de 120 pages intitulé Quand Google défie l'Europe / Plaidoyer pour un sursaut (Éditions Mille et une nuits). Une dépêche AFP souligne que cet appel connaît un certain retentissement, même à l’échelon international. De fait, quelques jours plus tard les chefs d’État de six pays membres de l'Union européenne (France, Pologne, Allemagne, Italie, Espagne et Hongrie) ont demandé dans une lettre à la Commission européenne et au Conseil de l’Europe la mise en place rapide d’un débat sur une future « bibliothèque numérique européenne », soulignant que « Le patrimoine des bibliothèques européennes est d'une richesse et d'une diversité sans égales. [...] S'il n'est pas numérisé et rendu accessible en ligne, ce patrimoine pourrait, demain, ne pas occuper toute sa place dans la future géographie des savoirs »137.
Nikesh Arora (alors Vice-Président
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tégralement et en rendant accessibles des extraits d’ouvrages » sans l’autorisation des ayants droit, « la société Google a commis des actes de contrefaçon de droits d’auteur au préjudice des éditions du Seuil, Delachaux & Niestlé et Harry N. Abrams », ainsi qu’au préjudice du SNE et de la SGDL. .
Le 24 septembre 2009, l'audience du procès reprend devant la 3e chambre civile du TGI, avec la réévaluation du nombre d'infractions et une hausse du montant des dommages et intérêts réclamés : pour le préjudice « considérable et irrévocable » subi, La Martinière réclame 15 millions d’euros ainsi qu'une astreinte de 100 000 euros par jour. Son argumentation est construite autour de la loi applicable à ce type de différend, et sur la nature de la contrefaçon :
Pour Me Marie-Anne Gallot Le Lorier (avocate du SNE) c'est la loi française qui s'applique car la diffusion et la représentation des extraits de livres numérisés était constatée (entre autres) en France, quand bien même leur reproduction pouvait avoir eu lieu aux États-Unis (ce qui est possible mais incertain, puisque d'après ses dires « Google ne fournit que des déclarations de ses propres services, mais ne communique pas les contrats signés avec les bibliothèques »). Elle déclare
Par ailleurs la SGDL souligne que la numérisation effectuée par Google porte atteinte au droit moral des auteurs, en raison de la mauvaise qualité des reproductions, des coupes aléatoires dénaturant les œuvres et de la non-autorisation de republication d’œuvres dont les auteurs ne souhaitent plus la divulgation122.
La défense de Google s'appuie au contraire sur la loi américaine, concernée dans la mesure où la numérisation se déroule aux États-Unis (ce qui rendrait incompétent le tribunal d'instance). Sur la question des extraits affichés dans les résultats de recherche, Google estime qu'ils relèvent de l’usage normal du droit de citation prévu en droit français. Le groupe déclare par ailleurs que le nombre avancé d'œuvres numérisées est « grossièrement surévalué »123. Enfin, l'avocat de Google déclare : « ce que fait Google est absolument légal. Nous n'avons jamais nié que les Éditions du Seuil détiennent les droits sur les œuvres papier, mais elles n'ont jamais prouvé qu'elles avaient les droits sur les versions numériques de ces œuvres124. »
Le jugement a été rendu vendredi 18 décembre125 : le tribunal de grande instance de Paris a interdit au groupe américain de poursuivre la numérisation et la diffusion d'ouvrages sans autorisation des auteurs et éditeurs, exécutable au terme d'un mois avec 10 000 euros par jour de retard au bout de ce délai, ainsi qu'une condamnation à verser 300 000 euros (au titre des dommages et intérêts) à La Martinière et un euro au SNE et à la SGDL126. Les auteurs et éditeurs ne veulent pas pour autant couper les ponts avec le gé
Le 24 septembre 2009, l'audience du procès reprend devant la 3e chambre civile du TGI, avec la réévaluation du nombre d'infractions et une hausse du montant des dommages et intérêts réclamés : pour le préjudice « considérable et irrévocable » subi, La Martinière réclame 15 millions d’euros ainsi qu'une astreinte de 100 000 euros par jour. Son argumentation est construite autour de la loi applicable à ce type de différend, et sur la nature de la contrefaçon :
Pour Me Marie-Anne Gallot Le Lorier (avocate du SNE) c'est la loi française qui s'applique car la diffusion et la représentation des extraits de livres numérisés était constatée (entre autres) en France, quand bien même leur reproduction pouvait avoir eu lieu aux États-Unis (ce qui est possible mais incertain, puisque d'après ses dires « Google ne fournit que des déclarations de ses propres services, mais ne communique pas les contrats signés avec les bibliothèques »). Elle déclare
Par ailleurs la SGDL souligne que la numérisation effectuée par Google porte atteinte au droit moral des auteurs, en raison de la mauvaise qualité des reproductions, des coupes aléatoires dénaturant les œuvres et de la non-autorisation de republication d’œuvres dont les auteurs ne souhaitent plus la divulgation122.
La défense de Google s'appuie au contraire sur la loi américaine, concernée dans la mesure où la numérisation se déroule aux États-Unis (ce qui rendrait incompétent le tribunal d'instance). Sur la question des extraits affichés dans les résultats de recherche, Google estime qu'ils relèvent de l’usage normal du droit de citation prévu en droit français. Le groupe déclare par ailleurs que le nombre avancé d'œuvres numérisées est « grossièrement surévalué »123. Enfin, l'avocat de Google déclare : « ce que fait Google est absolument légal. Nous n'avons jamais nié que les Éditions du Seuil détiennent les droits sur les œuvres papier, mais elles n'ont jamais prouvé qu'elles avaient les droits sur les versions numériques de ces œuvres124. »
Le jugement a été rendu vendredi 18 décembre125 : le tribunal de grande instance de Paris a interdit au groupe américain de poursuivre la numérisation et la diffusion d'ouvrages sans autorisation des auteurs et éditeurs, exécutable au terme d'un mois avec 10 000 euros par jour de retard au bout de ce délai, ainsi qu'une condamnation à verser 300 000 euros (au titre des dommages et intérêts) à La Martinière et un euro au SNE et à la SGDL126. Les auteurs et éditeurs ne veulent pas pour autant couper les ponts avec le gé
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